Les textes de cette page sont tous extraits du livre "Questions autour de l'homme réel" de François Ader
Jean-Paul II, pape
Le pape s’exprime sur les Jésuites
Je tremble de voir rappeler, avec une sorte de sentiment
d'évidence, que « les jésuites
appartiennent à un corps universel et se trouvent momentanément dans telle ou
telle communauté locale » : « momentanément »… De voir dire avec aisance que « le temps des entreprises personnelles non
reliées au corps approche de son terme » : qu'est-ce donc que le
lien avec le « corps » ? J'ai peur – oui : peur – devant
ces grandes considérations d'ensemble formulées de si haut.
Le voyage de Jean-Paul II en Irlande et aux États-Unis
Le premier voyage de Jean-Paul II, en Irlande et aux
États-Unis, a été pour ce Pape l'occasion de s'exprimer sur les questions touchant
à la vie sexuelle et affective de l'homme : Non au divorce, Non à la
contraception, Non à l'avortement, Non au mariage des prêtres, Non au sacerdoce
des femmes, Non à l'homosexualité… « Oui à la tolérance », ajouta
perfidement un dessin satirique. Ce fut un coup pour beaucoup d'entendre cet
amalgame de questions profondément différentes qui n'avaient d'autre lien que
leur rapport à la sexualité et le fait d'être globalement interprétées comme
autant d'indices d'une même perversion.
Mgr Illich, évêque
J'y ai lu, sous la plume d'un prêtre absolument pas
contestataire, dans une lettre qu'il adressait à son évêque, ces mots
bouleversants concernant les quatre-vingt-cinq questions soumises alors par
Rome à Monseigneur Illich et auxquelles j'ai déjà fait allusion lorsque j'ai
parlé de conduites aussi dictatoriales vis-à-vis d'autres prêtres, et de
théologiens notamment :
" Je suis indigné et profondément scandalisé. Non, ce n'est pas possible, ce ne peut être cette Église dont je suis ministre, qui redonnait et accepte ce que le Saint-Office vient de réaliser vis-à-vis de Mgr Illich.Je ne connais pas « Illich », je ne connais pas les problèmes d'Amérique latine, mais ces quatre-vingt-cinq questions que je viens de lire me donnent une véritable nausée. Je suis littéralement bouleversé, je me sens atteint au plus profond de mon sacerdoce."
Guy Riobé, prêtre, évêque
Je pense à Monseigneur Riobé et à sa dernière visite à
Rome. Tancé la veille pendant plus d'une heure par Monseigneur Bénelli, comme
« un gamin qui s'est mal comporté »,
semoncé par Paul VI durant quelques minutes d'entretien personnel, et alors
averti du « non »
catégorique au souhait qu'il avait émis de voir l'Église envisager d'ordonner
prêtres des hommes mariés, il remet au Pape sa démission d'évêque. Puis « il se met à marcher, hébété, des heures
durant, dans les rues de Rome ». Il décide d'aller prier, le lendemain
matin, avec la fondatrice des petites sœurs, Sœur Madeleine, qu'il connaît bien.
C'est là qu'arrive à le localiser enfin Monseigneur Bénelli
qui décide de venir l'y rejoindre le lendemain. L'entretien durera deux heures.
Guy Riobé, depuis deux jours, a beaucoup prié. C'est lui, cette fois, qui prend
avec Mgr Bénelli la direction de la conversation. « Il impose d'abord un moment de prière, lit un passage de Saint Paul,
invoque le Saint-Esprit. Puis il demande des explications. Mgr Bénelli lui
ouvre un dossier où Guy-Marie Riobé est stupéfait de trouver des textes de lui,
des exposés faits à de petits groupes, des lettres très privées, des éléments
de sa vie… ». Sainte Église
catholique romaine !
Cardinal Pellegrino
Je trouve à cette impasse un élément de réponse dans les
propos du Cardinal Pellegrino. Interrogé de façon très directe, cet ancien
archevêque de Turin s'exprime fort librement sur des questions brûlantes actuelles.
« Comment expliquez-vous la peur de
parler », lui demande son interlocuteur ? « Une fausse humilité, un certain esprit
d'obéissance… Peut-être… Qui peut le dire ? C'est un fait que la
franchise, à laquelle je me réfère souvent, est très rare dans l'Église
d'aujourd'hui… ». A propos du style d'intervention des Congrégations
romaines : « Dans l'Église il
n'y a pas assez de respect pour la liberté. Je comprends qu'on ait peur des
désordres, peur des dégâts causés à l'Église. Mais je crois que cette peur agit
à fin contraire et qu'elle est disproportionnée à la réalité. Il n'y a pas de
liberté de parole et d'écrit ».
Edouard Schillebeeckx, dominicain, théologien
Je vais me référer pour cela à deux dimensions dont Edouard
Schillebeeckx explique, dans son récent ouvrage sur « Le Ministère dans
l'Église », qu'elles ont historiquement
agi pour fonder l'obligation du célibat sacerdotal. La première est la
résurgence, dans les communautés chrétiennes des premiers siècles, des lois de
pureté rituelle formulées dans certains livres de l'Ancien Testament et dont le
paganisme d'alors se faisait l'allié en voyant dans le temps fort de la
relation sexuelle une perte de raison. Il n'était pas possible, pensait-on,
qu'un prêtre monte à l'autel après qu'il se fut « souillé », la nuit
même, dans le commerce charnel. Une loi liturgique décida donc d'interdire aux
prêtres, cette nuit-là, la pleine expression de leur amour conjugal. Continence
qui dut donc devenir totale – du moins en théorie, mais la loi n'était que peu
suivie, et l'autorité le savait – lorsque, vers la fin du IVe siècle, on
commença de célébrer quotidiennement l'eucharistie.
HansKüng, théologien
Il me tient à cœur, aussi, de dire ce que je dois au tout
petit « Être chrétien » de
Hans Küng. J'ai ressenti ces 80 pages comme une « bonne chose », je les ai reçus comme une réponse. J'ai
notamment aimé qu'y soit si bien située la « justification par la foi » et qu'il y soit précisé :
« Ce qui importe à l'homme, en fin
de compte, face à tous les appels à l'action, ce ne sont pas ses réalisations,
c'est, au contraire, sa confiance absolue en Dieu, dans le bien comme dans le
mal, c'est-à-dire sa confiance dans un sens ultime donné à sa vie ».
Mémoires de l'abbé Oraison
Il faut lire à cet égard, dans les Mémoires de l'abbé
Oraison, les propos qu'il entendit de la bouche même du très estimable Cardinal
Ottaviani : « Pour les difficultés sexuelles, des spaghettis et la
peur de l'enfer… » On sourit. Mais c'est la thérapeutique qui a prévalu
pour des générations. Et que ne dément pas tellement, dans des termes plus
choisis, tel document d'il y a quelques années seulement.
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